Story of MEDEA
Question : Comment en êtes-vous arrivée à travailler avec Pasolini ?
Maria Callas : Depuis longtemps, chaque année, Franco Rossellini m'offrait gentiment de faire un film. Pour une raison ou pour une autre je refusais, et tout particulièrement je refusais l’opéra filmé. À un moment donné on s'arrêta à Macbeth, dont le metteur en scène aurait peut-être été Antonioni ou Bolognini : mais je tenais davantage à la tragédie qu'à l'opéra, et rien ne se fit. Un an plus tard, Rossellini vint à moi avec un projet concret de Pasolini, sur Médée - c'était, je crois, le 19 octobre 68, et nous nous sommes rencontrés dans une heureuse coïncidence de bonne volonté. J'avais vu Edipo Re, que j’avais aimé, puis Théorème, que je n'ai pas compris, la vérité et la clarté me sont nécessaires à cent pour cent : j'ai aimé aussi L’Évangile. En général, on parle bien de Pasolini, contestataire, comme on dit aujourd'hui, ingénu, poète, inventif, sincère, sans défenses même. Mais la première fois que j'ai parlé avec lui, il ne m'a pas persuadée : j'ai attaqué les intellectuels qui sont trop difficiles et enlèvent la vérité aux choses, qui ont le nez sur leurs livres et ne voient pas la vie. Il n'a pas réagi à ce moment-là, c'est vrai, il n'a pas eu envers moi d'attitude violente, je veux dire verbalement bien sûr.
Question : Et ainsi…
Maria Callas : Ainsi j'ai compris que le travail avec lui serait facile. Depuis ce moment et par la suite, après cette première rencontre, puis, quelques temps après, le film commença et Pasolini ne s'est jamais imposé lui-même ni à mon égard en tant qu'actrice, ni à l'égard du personnage de Médée, après m'en avoir éclairé son interprétation.
Question : Vous-même, comment avez-vous vu Médée ?
Maria Callas: La moins sanguinaire possible, je ne crois pas au grand guignol… La Médée d'Euripide, c'est deux heures de tragédie très lourde. Pasolini a eu une idée extraordinaire, que j'ai beaucoup aimée : il y a une Médée barbare et une grecque, il y a le rêve et il y a la réalité. Chez Cherubini il y a la tragédie et c'est tout. Celle-là est plus moderne, à la tragédie proprement dite on arrive progressivement, après le milieu de l'histoire, car il y a tout un entourage de mythologie et de légende très significatif. D'autre part, nous avons construit le personnage chemin faisant, un peu ensemble, aussi pour l'adapter aux exigences d'aujourd'hui.
Propos recueillis par Giacomo Gambetti pendant le tournage de Médée (1970), Cahiers du Cinéma, Pasolini cinéaste, Hors-série 1981, p.69
Après Edipo Re (1969, Oedipe Roi), Pasolini adapte une nouvelle tragédie grecque. Si les décors et les costumes du film sont somptueux, Medea est d’abord, comme Mamma Roma, une rencontre avec une artiste exceptionnelle. Il s’agit du seul rôle que Maria Callas a accepté d’interpréter au cinéma.
MEDEA
MÉDÉE
Question : Comment en êtes-vous arrivée à travailler avec Pasolini ?
Maria Callas : Depuis longtemps, chaque année, Franco Rossellini m'offrait gentiment de faire un film. Pour une raison ou pour une autre je refusais, et tout particulièrement je refusais l’opéra filmé. À un moment donné on s'arrêta à Macbeth, dont le metteur en scène aurait peut-être été Antonioni ou Bolognini : mais je tenais davantage à la tragédie qu'à l'opéra, et rien ne se fit. Un an plus tard, Rossellini vint à moi avec un projet concret de Pasolini, sur Médée - c'était, je crois, le 19 octobre 68, et nous nous sommes rencontrés dans une heureuse coïncidence de bonne volonté. J'avais vu Edipo Re, que j’avais aimé, puis Théorème, que je n'ai pas compris, la vérité et la clarté me sont nécessaires à cent pour cent : j'ai aimé aussi L’Évangile. En général, on parle bien de Pasolini, contestataire, comme on dit aujourd'hui, ingénu, poète, inventif, sincère, sans défenses même. Mais la première fois que j'ai parlé avec lui, il ne m'a pas persuadée : j'ai attaqué les intellectuels qui sont trop difficiles et enlèvent la vérité aux choses, qui ont le nez sur leurs livres et ne voient pas la vie. Il n'a pas réagi à ce moment-là, c'est vrai, il n'a pas eu envers moi d'attitude violente, je veux dire verbalement bien sûr.
Question : Et ainsi…
Maria Callas : Ainsi j'ai compris que le travail avec lui serait facile. Depuis ce moment et par la suite, après cette première rencontre, puis, quelques temps après, le film commença et Pasolini ne s'est jamais imposé lui-même ni à mon égard en tant qu'actrice, ni à l'égard du personnage de Médée, après m'en avoir éclairé son interprétation.
Question : Vous-même, comment avez-vous vu Médée ?
Maria Callas: La moins sanguinaire possible, je ne crois pas au grand guignol… La Médée d'Euripide, c'est deux heures de tragédie très lourde. Pasolini a eu une idée extraordinaire, que j'ai beaucoup aimée : il y a une Médée barbare et une grecque, il y a le rêve et il y a la réalité. Chez Cherubini il y a la tragédie et c'est tout. Celle-là est plus moderne, à la tragédie proprement dite on arrive progressivement, après le milieu de l'histoire, car il y a tout un entourage de mythologie et de légende très significatif. D'autre part, nous avons construit le personnage chemin faisant, un peu ensemble, aussi pour l'adapter aux exigences d'aujourd'hui.
Propos recueillis par Giacomo Gambetti pendant le tournage de Médée (1970), Cahiers du Cinéma, Pasolini cinéaste, Hors-série 1981, p.69
Après Edipo Re (1969, Oedipe Roi), Pasolini adapte une nouvelle tragédie grecque. Si les décors et les costumes du film sont somptueux, Medea est d’abord, comme Mamma Roma, une rencontre avec une artiste exceptionnelle. Il s’agit du seul rôle que Maria Callas a accepté d’interpréter au cinéma.
- RéalisationPier Paolo Pasolini
- ScénarioPier Paolo Pasolini d’après la tragédie d’Euripide
- ImageEnnio Guarnieri
- MontageNino Baragli
- MusiqueBenedetto Ghiglia
- Producteur (s)Franco Rossellini, Marina Cicogna
- ProductionsSan Marco S.p.A., Les Films Number one, Janus Film und Fernsehen
- Distribution FranceCarlotta Films
- InterprètesMaria Calas, Giuseppe Gentile, Massimo Girotti, Laurent Terzieff, Margareth Clementi, Sergio Tramonti, Luigi Barbini, Anna Maria Chio, Paul Jabara, Piera Degli Esposti, Gerard Weiss
- Année1969
- Durée1h 50
- Pays de productionItalie, France Allemagne
- FormatVOST
- CitationAide-moi à voler la Toison d’Or